Il y a soixante-dix ans, des nuages étaient lâchés sur des villes… pas pour protéger la population, mais pour tester sa réaction — sans lui demander son avis. Récit d’un temps où la science armée flirtait avec l’inconnu.
Le brouillard de St. Louis
Dans les années 1950, plusieurs grandes villes américaines furent secrètement aspergées par un brouillard chimique. À St. Louis, dans l’ombre de Pruitt-Igoe, et ailleurs, l’armée observait comment un nuage pouvait se répandre parmi les habitants, sans les prévenir.
San Francisco et l’expérience bactérienne
Quelques années plus tôt, en 1950, à San Francisco, la marine avait déjà testé l’effet d’une brume de Serratia marcescens et Bacillus globigii, deux bactéries supposées inoffensives. Mais l’expérience a tourné au drame : une dizaine de personnes furent hospitalisées, l’un en mourut.
L’opération LAC
À la fin de la décennie, l’armée larguait des particules fluorescentes de zinc-cadmium-sulfide au-dessus du pays, dans le cadre de l’opération LAC, pour cartographier les déplacements d’un aérosol. Ces expérimentations furent menées à grande échelle, sans témoin volontaire.
Héritage toxique
On parle aujourd’hui de cadmium comme d’un poison insidieux : cancérigène, néfaste aux reins… mais à l’époque, les autorités affirmaient que la substance était sans danger.
Cette histoire heurte parce qu’elle met en lumière un paradoxe : la science militaire cherche à maîtriser, mais souvent oublie ceux qu’elle utilise comme cobayes. Et rappelle que le brouillard, parfois poétique, peut aussi cacher bien des ombres.