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Le Manuscrit de Voynich : enquête, analyses et pistes

Par hollowsoul · 17 août 2025

Le manuscrit de Voynich est un codex illustré, d’environ 240 pages, rédigé dans une écriture inconnue et décoré de dessins botaniques, astronomiques et de scènes étranges. Depuis sa redécouverte moderne en 1912, il demeure l’un des objets les plus ensorcelants et polémiques des études historiques et cryptographiques. On l’appelle souvent « le livre le plus mystérieux du monde », et à juste titre : aucun déchiffrement complet n’a jamais été reconnu.


Matériaux et datation : que nous dit la matière ?

Des analyses au radiocarbone situent la fabrication du parchemin entre 1404 et 1438, plaçant ainsi le manuscrit au cœur du XVe siècle. Cette datation met fin aux théories qui l’attribuaient au XIIIe siècle et confirme que l’objet est bien médiéval.
La datation du support ne garantit pas que le texte soit porteur de sens, mais elle oblige à replacer toute hypothèse dans le contexte intellectuel et culturel de l’Europe (ou des régions connectées) de cette époque.


Description du contenu et des indices visuels

Les illustrations permettent de distinguer plusieurs sections :

  • Herbal : planches de plantes, certaines identifiables, d’autres inconnues ou composites.
  • Astronomique / astrologique : diagrammes stellaires et figures circulaires.
  • Biologique / balnéologique : femmes nues baignées dans des bassins reliés par des canaux.
  • Pharmacologique / recettes : paragraphes courts accompagnés de petites vignettes semblant décrire substances et préparations.

Les images suggèrent un savoir hybride, mêlant traditions médicales, astrologie et iconographie propre au monde médiéval, mais parfois déformées ou inventées.


Le texte : propriétés et énigmes linguistiques

L’« écriture » du manuscrit, souvent appelée voynichese, présente des régularités statistiques : répétitions, structures morphologiques récurrentes, et certaines lettres apparaissant presque toujours en position initiale ou finale.
Cela pourrait indiquer l’existence d’une langue codée ou artificielle… ou au contraire la mise en œuvre d’un procédé de génération aléatoire sophistiqué.


Les grandes familles d’hypothèses

1) Langue naturelle encodée / écriture inconnue

Certains pensent que le manuscrit retranscrit une langue perdue ou un dialecte caché derrière un alphabet inventé. Les partisans de cette théorie soulignent que la structure du texte imite celle d’une langue humaine. Mais aucune traduction cohérente n’a été acceptée.

2) Chiffrement complexe

Le texte pourrait être le fruit d’un code sophistiqué, peut-être à substitution multiple ou à stéganographie. Ce serait une prouesse technique pour le XVe siècle, mais aucun décryptage probant n’a encore émergé.

3) Canular élaboré

Popularisée par Gordon Rugg, cette hypothèse soutient que le texte a été généré artificiellement pour imiter la structure d’une langue, sans signification réelle. Cela expliquerait l’absence de traduction, mais pas forcément le lien entre texte et images, ni le soin extrême apporté au support.


Découvertes récentes

En 2024, l’imagerie multispectrale a révélé sur la première page des colonnes et annotations invisibles à l’œil nu. Ces marques pourraient être des tentatives anciennes de déchiffrement ou des ajouts d’un propriétaire antérieur.
Parallèlement, l’intelligence artificielle a été mobilisée pour repérer des motifs cachés dans le texte. Les résultats montrent des régularités mais, à ce jour, aucun sens global n’a émergé.


Évaluation critique

Les pistes les plus sérieuses combinent plusieurs approches :

  1. Interdisciplinaire : paléographes, chimistes, historiens et cryptanalystes travaillant ensemble.
  2. Imagerie avancée : détection de corrections, couches effacées ou annotations anciennes.
  3. Comparaison iconographique : rapprocher les dessins d’herbiers, d’almanachs et de traités alchimiques du XVe siècle.
  4. Tests expérimentaux : reproduire des textes artificiels médiévaux pour les comparer statistiquement.

Conclusion

Objet authentique mais indéchiffré, le manuscrit de Voynich demeure un défi lancé à la science comme à l’imagination. Est-il le recueil codé d’un savant visionnaire, un manuel médical exotique, ou l’œuvre malicieuse d’un faussaire médiéval ?
Chaque nouvelle technologie apporte son lot d’indices, mais la clé de ce livre pourrait rester enfouie… à moins qu’elle n’existe pas. Et c’est peut-être ce doute, plus encore que le texte, qui en fait le charme éternel.


Sources

  • Résultats de datation carbone et analyses matérielles (Université de l’Arizona).
  • Études iconographiques et paléographiques diverses sur le manuscrit.
  • Imagerie multispectrale et découverte d’annotations invisibles (The Art Newspaper, 2024).
  • Analyses statistiques et linguistiques récentes (Language Log, Cryptologia).
  • Hypothèse du canular élaboré par Gordon Rugg.

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