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L’étrange affaire Mona Fandey

Mona Fandey, de son vrai nom Maznah Ismail, est l’une des figures criminelles les plus étranges et controversées de Malaisie, dont le nom est devenu synonyme d’occultisme, de rituels sombres et de meurtre. Son histoire, mêlant superstition, meurtres rituels et une personnalité intrigante, continue d’alimenter l’imaginaire collectif malaisien, et d’interroger sur la puissance de la croyance en l’occulte et l’impact psychologique qu’elle peut exercer. Explorons les éléments clés de cette affaire qui relève à la fois du drame criminel, de l’inexpliqué et du morbide.

Le parcours de Mona Fandey : des rêves de célébrité à l’occulte

Maznah Ismail est née en 1956 en Malaisie. Elle aspirait à devenir une chanteuse populaire, espérant que ses talents artistiques la mèneraient à la gloire. Sous le nom de scène « Mona Fandey », elle enregistre quelques morceaux dans les années 1980, mais sa carrière reste confidentielle, sans jamais atteindre le succès escompté. Cependant, Mona semble être une femme ambitieuse et tenace, prête à explorer d’autres moyens pour obtenir richesse et reconnaissance. Elle commence à se tourner vers l’occulte, revendiquant des capacités de sorcière et de guérisseuse spirituelle, et proposant des services de « bomoh » (chamane malaisienne) aux élites locales, leur promettant réussite et prospérité.

Le personnage de Mona Fandey devient alors un mélange de show-business, de spiritualité et de sorcellerie. Elle se met à offrir des rituels et des amulettes censés apporter chance, pouvoir et succès. Elle gagne ainsi une certaine notoriété auprès de clients fortunés, dont certains hommes politiques. Cette nouvelle voie s’avère bien plus lucrative pour elle, lui permettant d’afficher un style de vie flamboyant, fait de vêtements extravagants, de bijoux luxueux et d’un goût pour l’excentricité. Son ascension dans l’occulte la rend alors à la fois crainte et respectée, consolidant son statut de personnalité ambiguë, à mi-chemin entre célébrité et sorcière.

Le meurtre d’un homme politique : un rituel macabre

L’histoire de Mona Fandey bascule en 1993 avec le meurtre d’un politicien local, Datuk Mazlan Idris, qui aspirait à devenir ministre en Malaisie. Datuk Mazlan, désireux de garantir sa réussite politique, aurait cherché à obtenir les services occultes de Mona, croyant que ses rituels et ses objets mystiques le rendraient invincible. Mona, avec l’aide de son mari, Mohamad Nor Affandi Abdul Rahman, et d’un assistant nommé Juraimi Hassan, propose à Mazlan un rituel destiné à accroître son pouvoir. Mais ce rituel prend une tournure terrifiante.

Le 18 juillet 1993, Mazlan se rend chez Mona pour participer à un rituel de purification. Ce dernier lui demande de s’allonger, affirmant que cela fait partie du processus spirituel. Mazlan obéit, mais il est brutalement décapité par Juraimi Hassan, sur les ordres de Mona et de son mari. Le corps de Mazlan est ensuite démembré et enterré dans une fosse près de la résidence de Mona. Des fragments du corps, ainsi que des objets rituels – incluant notamment une hache et des objets personnels de la victime – sont retrouvés sur les lieux.

Le meurtre est rapidement découvert et soulève un véritable choc dans tout le pays. La nature macabre et méthodiquement organisée de l’assassinat, ainsi que les motivations occultes qui l’accompagnent, donnent un caractère presque surréaliste à l’affaire, transformant Mona Fandey en une sorte de « sorcière maléfique » aux yeux de l’opinion publique.

Procès et exécution : une affaire teintée de mysticisme et de controverse

Le procès de Mona Fandey, son mari et Juraimi Hassan débute en 1995 et devient rapidement un événement médiatique majeur en Malaisie. Mona apparaît souriante et sereine, habillée de manière extravagante, avec un maquillage prononcé, et arborant même des poses et des sourires destinés aux photographes. Cette attitude désinvolte face à des accusations aussi graves choque profondément le public. Mona semble presque savourer l’attention médiatique, comme si le procès constituait un retour sous les feux de la rampe qu’elle avait tant désiré autrefois. Ce comportement contribue à renforcer son image de sorcière insensible, manipulatrice et dangereuse.

Le témoignage accablant de Juraimi Hassan, qui confirme les détails macabres du meurtre et les motivations rituelles qui y sont liées, finit par convaincre le jury. Mona et ses complices sont jugés coupables et condamnés à mort. Pendant son procès et jusqu’à son exécution, Mona répète qu’elle n’a aucun regret et continue à sourire, même lors de ses dernières apparitions publiques. Elle est exécutée par pendaison le 2 novembre 2001. Ses dernières paroles, selon les gardiens de la prison, auraient été : « Je ne mourrai jamais », une déclaration énigmatique qui, là encore, renforce l’aura mystique de son personnage.

L’héritage de Mona Fandey : entre légende urbaine et étude de l’occulte

Depuis son exécution, l’histoire de Mona Fandey demeure une légende urbaine en Malaisie. L’affaire a inspiré de nombreux livres, articles et même un film, « Dukun », sorti en 2018, qui revisite le personnage et le mythe de Mona en le mêlant à d’autres récits de sorcellerie. La fascination pour cette affaire découle en grande partie de la personnalité excentrique de Mona et du caractère brutal du meurtre, mais également de l’élément surnaturel. Mona est devenue une figure presque mythologique, symbolisant la dangerosité de l’attrait pour le pouvoir et la superstition.

Certains considèrent même Mona Fandey comme un exemple de manipulation psychologique par l’occulte. En exploitant les croyances mystiques de ses victimes, elle a démontré à quel point des personnes influentes pouvaient être manipulées dans leur quête de succès. Ce cas souligne également la fascination humaine pour l’inconnu et l’invisible, en particulier dans des sociétés où les traditions animistes et la croyance en des forces surnaturelles restent ancrées.

Mona Fandey et la fascination pour l’inexplicable

Mona Fandey incarne, pour beaucoup, la convergence troublante entre l’occulte, le crime et la psychologie. Son histoire rappelle également les dangers des pratiques occultes, non seulement pour ceux qui les entreprennent, mais aussi pour ceux qui s’y exposent avec naïveté ou désespoir. Le cas de Mona est aussi une réflexion sur le pouvoir que peuvent exercer des individus charismatiques, manipulateurs et « illuminés », capables d’entraîner autrui vers des actes terribles au nom de la superstition.

Plus qu’un simple fait divers, l’affaire Mona Fandey est devenue un conte sombre, hantant l’imaginaire collectif de la Malaisie, avec son lot d’ombres et de mystères qui continuent d’inspirer la peur et l’intrigue. Dans une époque où la science et la rationalité tentent de déchiffrer le monde, Mona Fandey reste un rappel saisissant des profondeurs de l’esprit humain et de son appétit pour l’inexpliqué.

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