L’histoire de Carl Tanzler est l’une des plus troublantes du XXe siècle, mêlant obsession, amour impossible, et nécrophilie. Elle fascine et horrifie à la fois, nous plongeant dans les profondeurs de l’âme humaine où l’amour et la folie se confondent dangereusement. Carl Tanzler, également connu sous le nom de Comte Carl von Cosel, était un radiologue d’origine allemande qui a vécu à Key West, en Floride, et qui est devenu tristement célèbre pour avoir gardé et préservé le cadavre de la femme qu’il aimait pendant près de sept ans.
Un homme énigmatique aux identités multiples
Carl Tanzler est né en 1877 à Dresde, en Allemagne. Son passé est empreint de mystères et de contradictions, beaucoup d’éléments ayant été embellis ou inventés par Tanzler lui-même. Il se faisait appeler « Comte Carl von Cosel » et prétendait posséder divers diplômes académiques, dont la véracité reste douteuse. Avant de s’installer en Floride, il a vécu en Australie et a été interné dans un camp de prisonniers pendant la Première Guerre mondiale. En 1926, il émigre aux États-Unis, rejoignant sa sœur à Zephyrhills, en Floride, avant de déménager à Key West, où il est embauché comme technicien radiologique à l’hôpital marine de l’US Navy.
La rencontre fatidique avec Elena Hoyos
L’histoire de Tanzler prend un tournant macabre lorsqu’il rencontre Maria Elena Milagro « Helen » de Hoyos en 1930. Elena Hoyos, une jeune femme cubaine-américaine d’une grande beauté, n’avait que 21 ans lorsqu’elle fut présentée à Tanzler. À ce moment-là, elle était déjà atteinte de tuberculose, une maladie souvent mortelle à l’époque. Carl Tanzler, alors âgé de 53 ans, était immédiatement fasciné par elle. Il croyait fermement qu’elle était la femme de ses visions, qu’il prétendait voir depuis son enfance, et qu’elle était destinée à être son grand amour.
Obsédé par Elena, Tanzler employa tous les moyens possibles pour tenter de la guérir, allant au-delà de ses capacités médicales limitées. Il lui administra des médicaments coûteux et lui fit subir divers traitements expérimentaux, tous infructueux. Malgré ses efforts, Elena Hoyos succomba à la tuberculose le 25 octobre 1931. Pour Tanzler, cela ne marqua pas la fin de son amour, mais plutôt le début d’une obsession morbide.
La profanation et la préservation du corps
Après la mort d’Elena, Tanzler obtint la permission de sa famille pour financer ses funérailles et fit construire un mausolée en son honneur. Il visitait le mausolée presque tous les soirs, prétendant que l’esprit d’Elena lui parlait et lui demandait de la libérer. En avril 1933, deux ans après sa mort, Tanzler exhuma secrètement le corps d’Elena et le ramena chez lui.
Ce qui s’ensuit relève du cauchemar. Le corps d’Elena, déjà en décomposition avancée, fut soigneusement reconstruit par Tanzler. Il utilisa du fil de fer pour maintenir les os ensemble et remplaça la peau putréfiée par de la soie trempée dans de la cire et du plâtre. Pour recréer les yeux, il utilisa des billes de verre. Les cheveux d’Elena, tombés lors de la décomposition, furent replacés, et il lui confectionna une perruque avec les cheveux récupérés. Tanzler bourra le corps de chiffons pour conserver sa forme et l’habilla de vêtements élégants. Il a même ajouté du parfum, des désinfectants et des agents conservateurs pour masquer l’odeur de la décomposition.
Il vécut ainsi avec le cadavre momifié d’Elena pendant près de sept ans. Selon certaines sources, il aurait dormi à côté d’elle dans le même lit, convaincu que son amour transcendant pouvait triompher de la mort. Des témoignages suggèrent également qu’il aurait tenté de restaurer les organes génitaux d’Elena pour entretenir une relation physique avec elle, ce qui a renforcé l’accusation de nécrophilie.
La découverte macabre et les conséquences judiciaires
En 1940, la sœur d’Elena, Florinda Hoyos, découvrit la vérité après avoir entendu des rumeurs que Carl Tanzler dormait avec un « mannequin » qui ressemblait étrangement à Elena. Elle alerta les autorités, et Tanzler fut arrêté. Le corps d’Elena fut exhumé et exposé dans une maison funéraire de Key West, où des milliers de curieux vinrent voir ce spectacle macabre.
Le procès de Tanzler pour profanation de tombe et détention illégale de cadavre commença peu après. À la surprise générale, Tanzler ne fut pas condamné. Les charges contre lui furent abandonnées en raison de la prescription des faits. Malgré la nature choquante de ses actions, Tanzler réussit à susciter une certaine sympathie. Beaucoup le considéraient comme un homme fou d’amour plutôt que comme un criminel pervers.
Un héritage sombre et perturbant
Après son procès, Carl Tanzler retourna à Zephyrhills, où il continua de vivre dans l’isolement. Il écrivit une autobiographie dans laquelle il raconta son amour éternel pour Elena. Dans ses dernières années, Tanzler créa une nouvelle effigie d’Elena à partir d’un mannequin grandeur nature, continuant son obsession jusqu’à sa mort en 1952.
L’histoire de Carl Tanzler soulève des questions profondes sur l’obsession, la maladie mentale et les limites de l’amour. Elle interroge également sur la manière dont une société peut réagir face à de tels actes. Certaines personnes ont vu en Tanzler un homme pris dans une spirale de folie, d’autres ont condamné son comportement comme étant purement criminel et dérangeant. Son cas reste une étude fascinante de la psyché humaine et un rappel troublant des ténèbres qui peuvent résider au sein de l’âme.
En définitive, l’histoire de Carl Tanzler est celle d’un amour morbide et tordu qui défie la mort elle-même, mais qui nous laisse avec plus de questions que de réponses.